Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Universum littéraire et musical
19 octobre 2013

Blanche ou l'oubli

D'ailleurs je ne te demande rien. Je ne dis pas, reviens, ou autres choses stupides. Ni tirons un trait et recommençons à zéro. Rien. Seulement j'aimerais que tu saches que pour toute ma maladresse, mon égoïsme, mon inattention, mes colères, mes humeurs, mes grossièretés, cette façon de considérer ce que je fais comme le plus important, cette solitude où je t'ai tant de fois laissée, ces distractions, ces... rien ne sert d'énumérer, pour tout cela et le reste, j'aimerais que tu saches que j'ai payé chaque jour, chaque nuit, que je paye encore, que je payerai jusqu'à mon dernier souffle. Je ne veux pas me faire un capital de ce que je paye. Je te dis simplement que je paye. Cela ne se voit pas. C'est une affaire entre moi et moi. C'est comme saigner dans son propre ventre. Je ne sais pas comment sont les autres, mais j'aurais voulu être différent, mieux. C'est plutôt raté. J'ai été aveugle, sourd, absurde. Je m'expliquais tout avec des raisons qui, même si je n'en savais rien, n'avaient de but que de me faire irresponsable à mes propres yeux, aux tiens aussi bien sûr, dans la mesure où j'avais la naïveté de croire qu'avec des raisons données on fait oublier à une femme l'humiliation perpétuelle qui lui vient d'un homme. Oh, et puis, ce que je te dis, je sais bien comment tu vas l'entendre! A quoi bon s'excuser toujours, puisque les excuses n'empêchent pas, n'ont pas empêché la récidive, toute une vie ? J'avais tellement cru pouvoir me changer, pouvoir en moi voir la chose à changer, paralyser les réflexes d'habitude, et  rien ne sert de dire que j'ai fait ce que j'ai pu, puisque, ce que j'ai pu, c'était comme rien. Dans ta lettre tu me disais, - et je crois que c'est tout ce que je pourrais ici en reproduire sans mourir de honte, comme un échantillon..., tu me disais : Ce que je veux ? Rien. Le dire. Que tu t'en rendes compte. Mais j'ai déjà essayé, je sais que c'est impossible... Tu vois, deux lignes, pas même, mais déjà cela j'étouffe d'horreur de moi. Je n'aurai été que cet homme-là pour toi. Que cet homme-là. Je ne dis pas ça pour montrer que j'ai compris, que je ne le ferai plus. Je le dis contre moi. Contre moi qui t'aime, qui n'aime que toi, et qui n'ai su être que cet homme-là pour toi. On ne peut pas se représenter un pire échec. Il est parfaitement inutile de mendier la pitié. Toute la responsabilité est pour moi. Je n'ai pas de pitié pour moi. Pourquoi t'en demanderais-je ? Tu as bien fait de me quitter. Te rends-tu compte de ce que je viens d'écrire. Tu as bien fait de me quitter.

Quitter... c'est un mot qui peut se comprendre de tant de façons. On quitte quelqu'un comme sur les images, en allant ailleurs, vivre avec quelqu'un d'autre. Ou non. On peut aussi quitter sur place. Sans que rien ne se voie. Sans que personne en pense : elle l'a quitté, il l'a quittée. Quelle abomination, mon Dieu, quelle abomination ! J'ai vu l'autre jour une interview au petit écran. Une femme demandait à un écrivain, son nom ne te dirait rien : "Parlez-moi du bonheur, Maître, parlez-moi du bonheur ! " Alors il s'est produit une chose bouleversante. Il l'a regardée, l'innocente, il l'a regardée et ses lèvres se sont mises à bouger comme s'il commençait à parler, mais il n'a rien dit. Elle, elle attendait, elle ne comprenait pas, et même elle a insisté : "Mais répondez-moi, Maître, qu'est-ce que c'est que le bonheur ? " Il n'a rien dit, et puis il a fermé les yeux comme pour cacher des larmes. Ah, ces questionnaires ! Qui êtes-vous, M. Bonheur ?

Pardonne-moi, Blanche, je n'ai pas le droit de te dire ces choses-là. Mais peut-être que tu ne les liras jamais. Ou que tu les liras après. Alors cela aura peut-être pour toi signification différente... Ecoute ce coeur que j'ai : comme il te venge bien !

Publicité
Publicité
Commentaires
Universum littéraire et musical
  • Mon espace personnel inconnu et où je peux retrouver tout ce que j'aime : mes souvenirs, mes chansons préférées, mes extraits de livres préférés avec les sentiments que j'y attache, les larmes que j'ai laissées couler dessus et autres merveilles.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité